DEUXIEME QUESTION : leur place et leur rôle dans le monde.

Le déplacement de Jésus qui s’en va comporte des conséquences pour le groupe des disciples qui doit se retrouver vis-à-vis du monde. Leur place n’est plus la même et leur rôle est modifié. L’absence de Jésus réoriente le groupe vers le Père et pousse les disciples à occuper la place laissée vacante par Jésus. D’une certaine manière, l’aménagement de cette place est une des préoccupations majeures de la prière de Jésus.

Il s’agit, selon l’intention de cette prière, de suivre les pas de Jésus : « Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi » (v.24). Pour ce motif, Jésus transmettra aux disciples sa condition d’envoyé : « Comme tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde » (v.18), après avoir demandé au Père de les sanctifier : « Sanctifie-les dans la vérité : ta parole est vérité » (v.17). En tant que sanctifiés et envoyés, les disciples porteront alors les deux traits principaux de l’identité de Jésus, traits auxquels Jésus lui-même fait allusion au moment d’argumenter son identité devant les autorités juives: « à celui que le Père a consacré et envoyé dans le monde vous dites : ‘Tu blasphèmes’, parce que j’ai dit : ‘Je suis Fils de Dieu’ ! » (10,36)

En partant vers le Père, Jésus installe alors les disciples dans sa place et les distingue comme sujets porteurs de la parole du Père dans le monde (Jn 17,17-19). Orienté vers le Père, ce groupe des disciples se différencie ainsi du monde qui, renfermé sur lui-même, représente l’opposition à toute possibilité d’altérité et de relation. Ce monde est pourtant bien l’objet de leur mission. Pour rejoindre Jésus, les disciples doivent, comme il l’a fait, affronter la haine du monde et sa confrontation. Leur tâche est bien cela : « vivre dans le monde » sans « être du monde ».  La prière de Jésus oriente les disciples dans ce sens : « Je leur ai donné ta parole et le monde les a haïs, parce qu’ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde. Je ne te prie pas de les enlever du monde, mais de les garder du Mauvais. Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde » (vv.14-16).

Communauté de disciples.

La sanctification des disciples est liée alors au fait d’avoir gardé la parole reçue comme une parole venue du Père. Ils portent la parole du Père et c’est à travers cette parole qu’ils seront « sanctifiés dans la vérité » (v.17.19). La confession de foi de Pierre au quatrième évangile avait déjà fait allusion à cette liaison entre la sainteté et le fait de porter la parole. Elle apparaît à la fin d’un long discours de Jésus où ses auditeurs se trouvent confrontés à prendre la décision de l’abandonner ou de le suivre. Au nom des douze, Pierre intervient pour exprimer la raison de leur foi et interpréter ainsi l’ensemble de l’enseignement de Jésus : « Seigneur, à qui irons-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Nous, nous croyons, et nous avons reconnu que tu es le Saint de Dieu » (Jn 6,68-69). La qualité des paroles que porte Jésus donne ainsi aux disciples la raison de croire et de reconnaître qu’il est le « Saint de Dieu ». L’emploi successif, dans ce texte, des verbes πιστευω et γινωσκω au parfait de l’indicatif, indique effectivement que cette profession de foi des douze est le fruit d’un approfondissement progressif de la parole de Jésus ainsi que d’une meilleure connaissance du mystère de sa personne.

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